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Garde à vue d’un mineur : Quid de l’information au représentant légal qui est aussi la victime présumée ?

Pénal - Procédure pénale
Civil - Personnes et famille/patrimoine
18/06/2020
La Cour de cassation a précisé, dans un arrêt du 17 juin 2020, que l’information de la garde à vue d’un mineur donnée à son représentant légal, qui est aussi la victime présumée de ses violences, ne peut garantir la conduite d’une procédure respectueuse des intérêts en présence. 
Un mineur est placé en garde à vue le 11 février 2019 pour des faits de violences sur un éducateur au sein de son foyer, ainsi que sur une jeune fille y vivant. Placé en garde à vue, le mineur s’est vu notifier ses droits et l’éducateur est informé de son placement en tant que personne ou service auquel est confié le mineur.
 
Trois jours après les faits, le juge des enfants place le mineur sous le statut de témoin assisté. Et le 7 août de la même année, son avocat saisit la chambre de l’instruction en nullité de la garde à vue ainsi que des actes et pièces trouvant leur support dans la garde à vue.
 
La cour d’appel, qui écarte le moyen tiré de la nullité de la garde à vue en raison de l’irrégularité de l’information donnée à la personne ou au service auquel il est confié, estime que le mineur a désigné l’éducateur en responsable puis a pris acte de l’avis donné à ce dernier. De plus, l’éducateur a été avisé donc s’il « a été entendu comme victime de faits pour lesquels le mineur a été placé en garde à vue, cette circonstance n’a pas, à ce stade de la procédure, porté atteinte aux intérêts de la personne concernée ».
 
Un pourvoi est formé en cassation par le mineur qui estime que :
- l’information a été donnée à l’éducateur du mineur placé en garde à vue, victime présumée des faits ;
- la chambre de l’instruction a violé l’article 593 du Code de procédure pénal en ne recherchant pas si le ou les responsables légaux devant être informés n’étaient pas le père ou la mère du mineur ;
- et que si le représentant légal se prétend victime des faits reprochés au mineur, alors toute diligence doit être faite pour délivrer un autre représentant.
 
La Cour de cassation, dans un arrêt du 17 juin, décide de censurer l’arrêt. Elle rappelle que l’article 4. II de l’ordonnance du 2 février 1945 dispose que « lorsqu’un mineur est placé en garde à vue, l’officier de police judiciaire doit, dès que le procureur de la République ou le juge chargé de l’information a été avisé de cette mesure, en informer les parents, le tuteur, la personne ou le service auquel est confié le mineur ». Ainsi pour la Cour :
- il n’appartient pas au mineur de désigner la personne responsable du foyer dans lequel il se trouve placé ;
- l’information de la garde à vue donnée au représentant légal du mineur, qui est aussi la victime présumée de ses violences, « ne garantit pas la conduite d’une procédure respectueuse des intérêts contraires en présence » ;
- l’irrégularité de l’information fait nécessairement grief au mineur, la formalité prévue ayant pour finalité de permettre à la personne désignée d’assister le mineur dans ses choix de personne gardée à vue dans le seul intérêt de sa défense.
 
La Haute juridiction décide alors que « la cassation est donc encourue. Elle interviendra avec renvoi, pour que la chambre de l’instruction détermine l’étendue de l’annulation ».
 
 
À noter que le Code de justice pénale des mineurs qui entrera en vigueur le 31 mars 2021 (initialement prévue le 1er octobre 2020, v. Code de justice pénale des mineurs : à quand l’entrée en vigueur ?, Actualités du droit, 19 mai 2020 et v. Loi fourre-tout : quelles dispositions en droit pénal ?, Actualités du droit, 18 juin 2020) disposera dans son article L. 413-7 qu’ « Après avoir avisé le procureur de la République ou le juge d'instruction du placement en garde à vue du mineur, l'officier de police judiciaire en informe les représentants légaux et la personne ou le service auquel le mineur est confié.
Il ne peut être dérogé aux dispositions de l'alinéa précédent que pour permettre le recueil ou la conservation des preuves ou pour prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne, sur décision du procureur de la République ou du juge d'instruction prise au regard des circonstances de l'espèce, et pour la durée que le magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures ou, lorsque la garde à vue ne peut faire l'objet d'une prolongation, douze heures.
Les représentants légaux sont informés du droit du mineur à être assisté par un avocat 
».
Source : Actualités du droit